Suor sdei Kâmpŭchea* !

*Bonjour Cambodge!

Don Khon, Laos, 12 février 2016

Nous sommes maintenant au Laos, dans la zone dites « des 4000 îles ».

Voilà les apprentissages sont faits, le petit déj est pris et les enfants sont partis jouer avec Robinson, Céleste et Joséphine, leurs nouveaux copains Français, qui font un tour du monde « sac à dos » avec leurs parents Frédérique et Julien (leur blog ici)!

Nous avons fini nos derniers kilomètres au Cambodge en pirogue à moteur sur le Mékong pour éviter 65 km inintéressants sur une vieille bande de goudron  truffée de trous de bombes américaines.

Le Cambodge est derrière nous, il est temps de vous raconter ce que nous avons vécu pendant 1 mois dans ce pays…

Arrivés par la ville de Poïpet le 10 janvier, nous sommes immédiatement submergés par de nouvelles impressions et nous avons le sentiment d’entrer dans un autre monde… La frontière est toujours un moment délicat, mais Antoine s’était bien renseigné, et nous esquivons facilement les « faux » facilitateurs. Pendant qu’Antoine fait la queue devant le bureau des visas, j’observe et je ne sais déjà plus où donner de la tête. Ça grouille de monde dans tous les sens, sans aucune organisation apparente: des immenses charrettes à bras rudimentaires et ultra-chargées (sûrement le chargement d’un camion plus facile à faire passer à pied?), des « tuck-tuck » en veux tu en voilà, des motos à 3,4,5 passagers, d’autres chargées de poulets ou de canards têtes en bas, des jeunes serveuses de casino bien sapées et en talons marchant dans la boue, et des tas d’enfants poussiéreux. Ce jour là, il fait gris, une averse nous accueille: Bienvenue au Cambodge!

A la frontière, nous changeons de sens de circulation et retrouvons la conduite à droite. Super! Nous allons retrouver nos réflexes. Mais certains véhicules roulent à gauche…Bizarre… Et surtout tout le monde klaxonne allègrement. Nous n’y comprenons rien, mais redoublons de vigilance!

Nous profitons de la ville pour acheter quelques denrées, plus rares à trouver en milieu rural. Là nous hallucinons encore, nous pouvons payer en riels (la monnaie locale) mais aussi en dollars (qui est aussi utilisé que le riel au Cambodge) et même en baths thaïlandais. Mais le plus étonnant, c’est que dans la caisse des boutiques (le plus souvent une simple poubelle en plastique) toutes ces monnaies sont joliment mélangées, dans la plus grande normalité.

Chouette, l’arrivée au Cambodge c’est aussi les retrouvailles avec la baguette de pain, un des acquis de la colonisation française!

Pour la route, pas beaucoup d’alternatives, c’est parti pour la national highway 5! Des plaines immenses de rizières animées de buffles et de zébus s’ouvrent devant nous.

Entre Sisophon et Siem Reap, nous trouvons un temple pour la nuit. Une fois la moustiquaire installée dans la pagode, nous partons manger… Nous irons de surprise en surprise avec nos 3 enfants, à la fois ébahis et agacés de ne rien trouver à leur goût pour manger. Criquets grillés, poussins frits, serpents séchés, pattes de poules, œufs pourris, brochettes de crapauds fourrés et j’en passe… non merci, finalement nous prendrons juste du riz et des bananes: Bon appétit!

Arrivés à Siem Reap, le 13 janvier, nous sommes accueillis par Seyha et toute sa famille (réseau Warmshower)! Nous allons dormir plusieurs nuits chez lui, « à la cambodgienne », c’est à dire sous la moustiquaire, dans une cabane en bambou et sur pilotis au-dessus d’un étang. Dans le « jardin », les déchets de la famille un peu éparpillés et brûlés de temps en temps, font partis du décors. A la nuit tombée, la musique s’élève de nulle part et de partout, sans cesse, et surtout sans que cela ne dérange personne (???); au petit matin, les moines bouddhistes prennent le relais en psalmodiant… Pour moi ce sera la découverte… des bouchons d’oreilles !

Avec l’équipe de Goshen Adventures, la petite entreprise que dirige notre hôte Seyha, nous partons visiter les temples d’Angkor avec nos vélos et par des petits itinéraires « off the beaten tracks ». Superbes découvertes: la beauté des lieux, le raffinement des temples, c’est magique et même calme, malgré le flot des touristes. Nous passerons 3 jours à arpenter le site à vélo, sans nous lasser, enfin, nous les parents; parce que les enfants étaient quand même bien rincés en fin de journée. Cela ne nous a pas empêchés de profiter de belles soirées dont deux partagées avec Vincent et Jeanne, oncle et tante d’Antoine qui, par le plus grand des hasards, étaient à Siem Reap en même temps que nous. Après une soirée de retrouvailles au resto, nous avons aussi été ensemble nous émerveiller d’un magnifique spectacle du cirque Phare! Des clowns-acrobates très expressifs nous en ont mis plein les yeux, on en redemande !

Notre séjour chez Seyha et sa famille aura été très riche en rencontres et découvertes. Une première ouverture sur la culture khmer et l’église adventiste du 7ème jour (le papa de Seyha est pasteur). Nous sommes tous plutôt heureux mais fatigués de ces quelques jours. On ne devient pas Cambodgien si facilement: les conditions de vie nous ont semblé  un peu rudes, avec l’habituel trio : chaleur, poussière et bruit.

Nous quittons Seyha et sa famille à 6h du mat’ pour être à l’heure au départ du bateau qui remonte le Tonlé Sap à destinations de Battambang.

Le trajet s’avère très éprouvant: entassés dans un petit bateau surchargé et qui tangue dangereusement, les oreilles collées au moteur, nous naviguerons pendant 8h dans une bonne chaleur et sans pouvoir bouger. Mais ce que nous découvrirons au fil de l’eau vaut vraiment le voyage. Nous verrons des villages entiers flottants sur le lac Tonlé Sap, des « maisons de pêche » avec leurs grands filets à balancier, une église, des boutiques et toujours les fameux long tail boat : tout un monde vit ici.

Nous arrivons à Battambang sur les rotules, les enfants sont sur les nerfs et nous avec! Ce soir, nous sommes attendus à l’Association Francaise de Solidarité Cambodge, où nous serons joyeusement accueillis par Solène et les enfants. Elle nous fait visiter avec beaucoup d’enthousiasme l’internat permettant de scolariser des enfants défavorisés. Les enfants sont très avenants et nous passerons une très belle soirée en leur compagnie. le lendemain soir, nous les retrouverons pour leur présenter notre voyage avec traduction simultanée par le directeur du site. Cela se terminera par plein de questions et des tours de vélo couché dans la cour pour les plus téméraires!

Nous avons maintenant tous besoin de nous reposer pour « digérer » tout ce que nous avons vécu ces derniers temps. Grâce à Charles Vincent, français habitant Battambang (Merci Georges pour la mise en relation), et ses conseils avisés, nous trouverons un lieu paisible pour récupérer. Nous partagerons aussi un bon moment avec Charles, sa femme et leur fille Yaelle, qui sera une chouette camarade de jeux pour nos enfants. Nous profitons de ces quelques jours pour : ne rien faire, aller manger de succulents gâteaux au chocolat, plonger dans la piscine et surtout discuter avec nos enfants, qui étaient particulièrement difficiles ces derniers temps. Depuis nous avons mis en place un debriefing quotidien et quelques règles de vie en famille en voyage, et pour la suite du voyage tout a été de nouveau bien expliqué. Ainsi, nous repartons de Battambang, en forme et prêt pour poursuivre notre route vers Phnom Penh!

Du 25 au 28 janvier, nous retrouvons la national highway 5, et c’est sur cette route que :
-nous ferons notre 1ere expérience de nuit au poste de la gendarmerie royale (cf. article « And the winner is… »)
-nous atteindrons nos 5000 km juste avant d’entrer dans Kompong Chhnang
-nous ferons notre record de distance journalière avec 96 km au compteur en arrivant à Phnom Penh dans la poussière de la route en réfection (cf. article « Pour un sourire d’enfant »)!

A Phnom Penh, après la visite marquante et vivante du centre PSE (re cf. article « Pour un sourire d’enfant »), nous irons à la rencontre du passé Cambodgien en allant visiter l’ancien centre de haute sécurité S21. Dans un ancien lycée, les Khmers Rouges avaient mis en place une horrible et folle machine de torture et d’extermination. Difficile de décrire l’horreur perpétrée par cette organisation. Joseph et Inès ont été particulièrement attentifs. Ils savent maintenant ce que signifie « génocide ». Au Cambodge, c’est près d’1/3 de la population qui est morte de malnutrition, de mauvais traitements, ou plus cruellement qui a été tuée entre 1975 et 1979. Nous avons beaucoup parlé avec nos enfants des Khmers Rouges, de leurs actions et des répercussions sur le Cambodge d’aujourd’hui.

Lundi 1er février, nous quittons la capitale, pour remonter le Mékong. Nous en rêvions, nous y sommes! Assez vite nous quittons la route nationale, pour des petites routes et parfois des pistes bosselées et poussiéreuses. Les paysages sont magnifiques: maraîchage et bananeraies se succèdent. C’est très peuplé, il y a de nombreuses habitations en bois sur pilotis. Nous vivrons aussi notre 2ème nuit au poste de police. Heureusement, entre les temples et les postes de police, nous trouvons aussi des petites guesthouses et même une « pizzeria bretonne » pour nous requinquer!

Arrivés à Kroch Chhma, nous cherchons comme d’habitude un endroit pour la nuit, un vieux monsieur vient à notre rencontre et nous offre l’hospitalité. Comme beaucoup d’anciens, il parle un peu français. Nous vivrons une expérience inédite avec Cong Thon, sa femme et tous ses voisins. Cela commencera pour les filles, par un « bain » en sarong dans le jardin, avec l’eau de la pompe à main, et sous le regard attentif d’un zébu. Puis Joseph partira chercher un coq en moto pour la soupe du soir. Il en reviendra fier comme sa victime ! Et pour finir nous dormirons tous ensemble, avec nos hôtes, dans l’unique pièce de la cabane sur pilotis!!! Nos hôtes de près de 70 ans dormant sur de simples nattes, on se trouve un peu chochotte avec nos matelas auto-gonflants!

Faute de routes, nous serons ensuite obligés de quitter le Mékong à Sandan pour nous enfoncer vers l’intérieur des terres le long de la route nationale. C’est plat, sec, très peu peuplé et brulé. Les paysages sont vraiment désolants et on décrypte une plus grande pauvreté encore. La route est particulièrement dure et inintéressante, et pour couronner le tout on a le vent de face! Grrrrrr! Nous sommes bien contents d’arriver à Stung Treng. Nous y retrouvons le fleuve et la perspective d’un bateau pour le Laos!

Nous sommes vraiment heureux d’avoir découvert le Cambodge, la richesse du patrimoine khmer et la beauté de ses paysages. Le sourire omniprésent des Cambodgiens et l’enthousiasme des petits comme des grands devant le passage de notre famille sur nos drôles de vélos ont aussi participé à nous faire apprécier ce pays particulièrement déconcertant et complexe. Ça n’a pas toujours été facile de se faire comprendre, n’y de trouver notre bonheur pour manger… Pour les enfants, il aura fallu faire des rattrapages de pancakes au Nutella, quand c’était possible !!!

Depuis le début de notre périple, c’est clairement le pays le plus éprouvant que nous ayons eu à visiter.

Tout cela en image très bientôt, c’est promis ! Demain nous reprenons nos vélos pour partir à la découverte du Laos!